Recueil n° 5 – 2016 6
De plus, il est possible de l’accrocher aux cimaises, soit de façon horizontale soit verticale, sans que cela n’altère la perception du
choc.
Il s’agit, en fait, d’une vision issue de la réalité, retranscrite dans un langage abstrait. Néanmoins, si on l’ignore, il est parfaitement
licite de se poser la question de son origine sémantique. D’un point de vue technique, cette œuvre est d’une maîtrise sans égale.
Trois zones structurent le tableau, lequel, observé verticalement, présente une zone bleue, à droite, symbolisant la mer. Une
zone blanche, en dégradés, au centre, soulignant la formation de l’écume, relâchée par la vague en mutation. Une troisième zone
noire, à gauche, symbolise le rivage. Le mouvement se crée à partir du moment où l’écume se métamorphose en son centre. En
s’infiltrant progressivement à l’intérieur de la zone bleue, l’artiste a abandonné le pinceau conventionnel pour utiliser une série de
pinceaux de petite taille et affirmer ainsi les nervures de l’écume, permettant au regard de pénétrer à l’intérieur des nombreux
contrastes et s’imprégner, de ce fait, du mouvement de la vague.
BENDOR CHRISTO
(mentionné plus haut) nous offre une technique qui tranche littéralement avec tout ce qui a été montré : les
cônes d’huile au pinceau sur toile. Il s’agit d’un mélange d’huile avec un medium sélectionné. L’artiste installe la toile en aplat et
pose la pointe du pinceau sur un point précis de l’espace pictural pour la retirer aussitôt. Le titre de cette œuvre est un hommage
à l’artiste
CHRISTO
qui a (notamment) recouvert de plastique de couleur rose l’île de Bendor. Malgré le changement de la
technique, le style, en tant que tel, demeure le même. L’on y retrouve la ligne ondulée séparant l’espace en plusieurs zones.
Malgré cette différence, l’artiste rend également hommage à
SEURAT
, en concevant par l’intermédiaire de la matérialité des
cônes, un « pointillisme » surprenant. De même, il met en exergue, que ce soit au centre ou en haut à droite, des rappels de
notes rouges, bleues et blanches pour rendre hommage à
PIET MONDRIAN
, dont ces trois couleurs trônent dans sa série des
VICTORY BOOGIE WOOGIE
. Il s’agit de l’évocation de moments de bonheur vécus. Une fois encore, la ligne en est la preuve :
elle est ondulée, comme dans
FEMME BLEUE
,
COCO AND COCO
ou
VENISE YIN ET YANG
(mentionnés plus haut). Associée
à la couleur vive, elle exprime la vie, le soleil et la joie de vivre.
CHRISTIAN BAJON-ARNAL a pour le trait, à l’origine de la ligne, une passion particulière, en ce sens que celui-ci représente une
forme de rationalité, étant donné que l’artiste a une
formation scientifique
, axée sur les mathématiques et qu’il a toujours voulu
s’exprimer à travers l’architecture. Par la suite, il s’est dirigé vers la peinture en s’attaquant d’abord aux figures à deux dimensions
pour aller enfin à la recherche de la troisième. Lorsque, en guise de présentation, nous disions que la ligne est dans sa peinture
l’assise de la couleur, à travers laquelle celle-ci se développe, l’artiste affirme devant l’Éternel que « peindre, c’est avant tout
utiliser la couleur ! » et qu’entre la ligne et cette même couleur, « aucune ne prend le dessus sur l’autre ! ». Si d’aucuns se
demandent comment s’est effectué le passage d’une écriture vers une autre, l’artiste répond qu’il est guidé par le tableau. Que
celui-ci lui impose sa propre écriture.
Que d’expressions du mythe dans l’œuvre de CHRISTIAN BAJON-ARNAL
! C’est au visiteur à présent de se confronter à son
univers pour le découvrir et y retrouver sa propre essence.
Arts
Lettres
Collection "Belles signatures" (© 2016, Robert Paul)